Equipe

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Comment persiste la complexité observée dans la nature ? Comment contribue-t-elle au fonctionnement des écosystèmes ? En plus des causes naturelles, les changements globaux sont présentement le principal facteur impactant la structuration et le fonctionnement des écosystèmes marins. Les populations et communautés, benthiques comme pélagiques, animales comme végétales, intègrent dans leur structure et leur fonctionnement les effets de ces variations spatiales et temporelles de l’environnement. Comprendre ces différents processus est essentiel pour prévoir et atténuer les éventuelles dégradations de ces écosystèmes.
La recherche effectuée au sein de DISCOVERY est motivée par la nécessité de mieux décrire, comprendre et modéliser les réponses des populations, communautés et écosystèmes aux variations des conditions environnementales et de départager l’effet des forçages d’origine naturelle et anthropiques. Elle s’articule autour de l’observation et l’expérimentation dans le présent et le passé proche, de la paléo-écologie, et d’une réflexion sur la construction de modèles prédictifs.
L’Axe de Recherche (AR) 1 porte sur la description de la biodiversité et des habitats dans des écosystèmes variés, afin d’être en mesure de statuer sur leur état de santé. L’AR2 cherche à décrire et comprendre comment les forçages environnementaux influencent les transferts de matière et d’énergie au sein des populations et des communautés marines, dans une vaste gamme de systèmes et d’échelles spatiales et temporelles. L’AR3 se concentre sur les variations spatiales et temporelles du recrutement chez un large éventail de modèles biologiques soumis à des contraintes environnementales différentes. L’AR4 allie paléo-écologie et observation in situ, afin de mieux comprendre la structuration, le fonctionnement et la productivité des systèmes dans le passé proche. L’AR5 œuvre à la construction de modèles conceptuels des changements à moyen et long termes des écosystèmes côtiers.
Axe de Recherche 1: Décrire et analyser la diversité (taxonomique, fonctionnelle et écosystémique)
Animation : L. Chauvaud (CNRS), J. Grall (UBO, LEMAR & UMS3113)
Les principaux facteurs de structuration des communautés des écosystèmes marins sont actuellement les changements globaux et l’accroissement des pressions d’origine anthropique. Ces communautés, qu’elles soient benthiques ou pélagiques, intègrent dans leurs structures les effets des changements environnementaux au cours du temps, qu’ils soient d’origine naturelle ou anthropiques. Ainsi par exemple les dragages, l’enrichissement organique liés aux développements urbains et aux activités agricoles, l’extraction de granulats, la pêche, le changement climatique ou l’eutrophisation (Birchenough et al., 2010, 2010, 2006; Foden et al., 2009; Frid et al., 1999; Rachor, 1990; Rees et al., 2006).
Aujourd’hui, certaines communautés sont largement étudiées car les espèces qui les constituent jouent un rôle fonctionnel essentiel dans l’espace côtier : production primaire benthique, remaniement des sédiments, stimulation de la dégradation et de la minéralisation de la matière organique, recyclage des sels nutritifs (Ragueneau et al., 2000), nourriceries, alimentation des niveaux trophiques supérieurs. D’autres le sont beaucoup moins, en milieu côtier ou hauturier : le macro-zooplancton et le micro-necton, bien que constituant l’environnement trophique des prédateurs supérieurs, sont difficilement accessibles.
Dans ce contexte, l’objectif de cet AR est double :
Il s’agit en particulier de se donner les moyens de répondre, à partir d’exemples bien précis, aux questions suivantes :
Axe de Recherche 2: Décrire et analyser les transferts de matière et d’énergie au sein des populations et des communautés
Animation : P. Pondaven (UBO), J. Flye-Sainte-Marie (UBO)
Localement, la biodiversité (génétique, spécifique, ou fonctionnelle) et la dynamique des communautés marines peuvent être modulées par divers mécanismes, parmi lesquels la dispersion des organismes et les pressions environnementales agissant sur ces derniers jouent un rôle majeur. Dans l’AR.2, l’objectif est de décrire et comprendre comment les pressions environnementales – qu’elles soient biotiques, abiotiques, d’origine naturelle ou anthropique – influent sur les transferts de matière et d’énergie au sein des populations et des communautés marines. Les mécanismes de recrutement, de dispersion et la connectivité entre écosystèmes et populations seront plus spécifiquement étudiés dans l’AR.3.
Dans un système population et/ou communauté-environnement les pressions environnementales sont susceptibles d’inclure :
Dans ce contexte, cet axe de recherche se propose d’étudier à la fois les communautés pélagiques (phytoplancton, zooplancton et poissons), benthiques (microphytobenthos, méiofaune, macroalgues, macrofaune, mégafaune), mais également de s’intéresser au couplage pelagos-benthos. Ces différents objets d’étude seront abordés en couplant les approches d’observation in-situ, d’expérimentation et de modélisation. Cet axe de recherche présente également un caractère transversal en terme d’échelle spatiale et temporelle. Il se propose de mieux comprendre comment les pressions environnementales influent sur les transferts de matière et d’énergie au sein des organismes, en s’intéressant notamment aux mollusques benthiques et aux poissons pélagiques au travers d’approches bioénergétiques ; mais également comment les pressions environnementales (« bottom-up » et « top-down ») ou la biodiversité (richesse spécifique et fonctionnelle) influent sur le fonctionnement de l’écosystème (réseaux trophiques, flux de matière et d’énergie : production primaire, secondaire, respiration, flux de nutriments et de carbone, etc.).
Axe de Recherche 3: Déterminisme du recrutement sous contraintes environnementales
Animation : L. Pecquerie (IRD), S. Pouvreau (Ifremer)
Contexte de l’AR
Les espèces marines, dans leur majorité, sont des organismes à cycle de vie bentho-pélagique, c’est à dire qui présentent un cycle de vie complexe comportant une phase larvaire de dispersion plus ou moins longue, au cours de laquelle le taux de mortalité est beaucoup plus élevé (de plusieurs ordres de magnitude) que lors des stades de vie suivants. A la fin de cette phase de dispersion, l’abondance larvaire est donc souvent très variable tant sur le plan spatial que temporel (Krebs, 1972; May and McLean, 2007) ce qui conditionne complètement le recrutement et par voie de conséquence le renouvellement de la population.
La complexité de l’étude du recrutement et de la dynamique d’une population réside donc dans le nombre important et cumulatif des différents processus. Ces processus sont généralement abordés en 4 étapes complémentaires : (1) la fécondité et la période de ponte des adultes (2) l’abondance et la survie larvaire, (3) le transport et la connectivité larvaire et (4) les facteurs contrôlant l’installation ou la fixation. De plus, ces processus sont non linéaires, interagissent plus ou moins (chaîne de facteurs) et opèrent à différents niveaux d’échelle spatiale et temporelle. Sans négliger cette complexité, il ressort que si le recrutement échoue plusieurs fois de suite, la population décline et peut disparaître surtout si d’autres facteurs défavorables s’additionnent, par exemple, des facteurs liés aux pressions anthropiques multiples et variées (e.g. Sale, 1991). En outre, dans le cas particulier des espèces ingénieurs d’écosystème, les répercussions affectent aussi fortement la distribution, la structure des communautés, la biodiversité et parfois l’écosystème en entier : l’huître creuse, l’huître plate, la crépidule sont autant d’exemples de notre laboratoire qui illustrent parfaitement cette problématique. Par contre, dès que les conditions redeviennent favorables à la vie larvaire, la forte fécondité individuelle souvent caractéristique de ces espèces peut suffire à reconstituer rapidement de nouvelles populations (e.g. Hughes, 2000).
Dans le contexte actuel du changement climatique, cette thématique du déterminisme du recrutement redevient d’actualité, (e.g. Beukema et al., 2009; Feehan et al., 2009; Parmesan, 2006). Bien qu’encore rare, certaines études tendent aussi à montrer que les perturbations liées au changement climatique sont loin d’être aussi triviales que la démonstration du simple effet unidimensionnel du réchauffement ou de l’acidification. Certains auteurs démontrent effectivement l’existence d’effets croisés complexes, reposant par exemple sur la théorie du match-mismatch (Donnelly et al., 2011; Menge et al., 2009; Toupoint et al., 2012).
Objectifs détaillés de l’AR
Cette AR se propose d’approfondir l’étude du déterminisme du recrutement en utilisant les espèces modèles de notre laboratoire (huîtres creuses et plates, pectinidés, crépidules…) et dans différents milieux (Rade de Brest, Baie de Quiberon, Baie de Saint Brieuc). Les actions spécifiques déjà identifiées au travers des projets en cours sont les suivantes :
Axe de Recherche 4: Paléoécologie et observation à moyen et long terme
Animation : J. Thébault (UBO), O. Gauthier (UBO)
S’il est aujourd’hui admis que les activités humaines impactent à divers degrés la structure et le fonctionnement des zones côtières de l’océan mondial, cette vision globale de l’impact de l’Homme cache néanmoins de nombreuses disparités temporelles et régionales. Cet AR s’appuiera sur l’observation à moyen et long terme et la reconstruction paléoécologique à partir d’archives biogéochimiques. Ces deux approches complémentaires permettront de décrire les variations temporelles des caractéristiques biologiques des écosystèmes, et de les analyser en termes de variation et dynamique naturelles, d’une part, et de réponse aux perturbations, d’autre part.
Le premier objectif de cet AR sera de décrire et analyser les patrons de diversité des communautés à l’échelle de l’habitat sur le cours et le moyen terme. L’observatoire de l’IUEM maintient des séries d’observation faune-flore portant sur une large gamme d’habitats côtiers sédimentaires et rocheux répartis sur l’ensemble du littoral Breton. Les séries les plus longues s’étendent sur les 25 dernières années. L’analyse de la diversité taxonomique et fonctionnelle des communautés permettra de mieux comprendre leur fonctionnement, leur état de santé, et, de manière plus générale, d’explorer les relations pouvant exister entre diversité et stabilité.
Le second objectif sera de reconstruire la variabilité actuelle et passée dans les écosystèmes côtiers, par l’analyse sclérochronologique et sclérochimique de coquilles de bivalves et de rhodolithes. L’étude des temps longs reposera sur des espèces longévives (> 100 ans) ou bien des spécimens extraits de dépôts anciens (e.g. amas coquilliers archéologiques) . L’étude de la haute fréquence temporelle fera appel à des organismes à faible longévité (e.g. Pectinidae) pour caractériser des processus allant de la journée à quelques semaines (e.g. dynamique phytoplanctonique).
Finalement, cet AR offre l’opportunité de coupler les données d’observations et les données paléo-écologiques. En effet, si nous disposons de séries d’observation de la faune benthique, les données environnementales mesurées à proximité immédiate du benthos, à moyenne et haute fréquence, sont généralement inexistantes. Or, elles sont nécessaires pour comprendre les variations des communautés benthiques. Les reconstructions paléo-écologiques à partir d’organismes prélevés aux sites d’étude devraient permettre de mieux comprendre les patrons et processus ayant eu cours sur les périodes couvertes par les séries d’observation, et au-delà.
Axe de Recherche 5: Horizon 2050 : Analyser / évaluer la structure et le fonctionnement des écosystèmes et développer des scénarios de réponses au changement global
Animation : Y.-M. Paulet (UBO), F. Le Loc’h (IRD)
Contexte
Il règne un consensus sur la nécessité de promouvoir une approche intégrée qui aura pour objectif d’apporter des réponses sur l’état, le fonctionnement des écosystèmes côtiers, l’origine de leur vulnérabilité, de construire des scénarios et de fournir les éléments nécessaires à une gestion durable et à l’adaptation des sociétés. La prise de conscience par les utilisateurs/acteurs de la mer et des littoraux, et plus globalement par tous les citoyens, d’avoir face à eux une « mer qui change » conduit à la formulation légitime de questions du type : Que pêcherons-nous demain le long de nos côtes ? Quelle anticipation pour l’aquaculture ? Comment penser une politique de conservation alors qu’une mise en mouvement globale des écosystèmes marins est déjà visible ?
Objectifs
Élaborer la base conceptuelle nécessaire en préalable à toute tentative, non pas de réponse mais de projet scientifique construit pour approcher la réponse aux questionnements sociétaux. Il s’agit d’œuvrer à la construction de modèles conceptuels des changements des écosystèmes côtiers. Ceci afin de permettre une meilleure compréhension du concept d’approche écosystémique dont l’un des objectifs est un usage durable des ressources naturelles. L’avancement vers cette conceptualisation doit nous amener à hiérarchiser les mécanismes qui sous-tendent le changement et à proposer/construire les questions scientifiques dont le traitement lui paraît incontournable.
Laboratoire LEMAR – 2018