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Les bruits abyssaux

De quoi s'agit-il ?

L'observatoire de l'IUEM déploit des réseaux d'hydrophones (micros sous-smarins) pour enregistrer et écouter les bruits abyssaux provoqués par les séismes et les éruptions volcaniques sous-marines. Ces bruits nous renseignent sur l'activité et le fonctionnement des dorsales océaniques, lieux où les plaques tectoniques s'écartent et où se forme le plancher océanique.

Nos réseaux d'écoute sont aussi disposés pour recenser certaines grandes baleines, notamment dans l'océan Indien austral, et observer leur migration saisonnière.

De façon inattendue, nos hydrophones enregistrent aussi des craquements d'icebergs, qui se détachent de la marge antarctique et qui se disloquent ensuite en remontant vers les latitudes plus tempérées, et le bruit de l'état de mer, lorsque des trains de houle de direction opposée se rencontrent.

L'IUEM est le premier institut européen à développer et à mettre en œuvre la technologie des hydrophones autonomes en dommaine profond hauturier. Au plan mondial, le Pacific Environmental Laboratory de la NOAA, avec lequel nous collaborons depuis 2000, a été le 1er laboratoire à développer cette technologie dans le domaine civil.

Pourquoi écouter les séismes sous-marins ?

L'essentiel des frontières de plaque actives, sur lesquelles se concentrent l'activité sismique mondiale, se trouvent dans les océans (Fig. 1 gauche). Cette activité sismique sous-marine est toutefois très mal captée par les réseaux sismologiques terrestres, d'une part en raison de l'éloignement de ces réseaux des zones actives, situées le plus souvent au milieu des océans, comme les 60 000 km de dorsales océaniques, d'autre part en raison de l'atténuation très rapide des ondes sismiques dans la croûte terrestre, qui ne parviennent donc pas jusqu'aux continents. Ainsi toute la sismicité océanique de faible magnitude, qui constitue 80% de l'activité sismique, n'est pas captée ou très imparfaitement localisée à partir des réseaux terrestres (Fig. 1 droite).  C'est pourtant cette activité de bruit de fond sismique de faible intensité qui caractérise le fonctionnement et la dynamique des dorsales et des failles sous-marines.

Afin de pallier cette lacune d'information, le Laboratoire Domaines Océaniques (UMR6538) de l'IUEM a développé un parc d'hydrophones autonomes dédié à la surveillance acoustique à long terme (une à plusieurs années) de la sismicité des domaines océaniques. Après deux expériences limitées dans l'Atlantique nord (SIRENA, 2002-2003) et dans l'océan Indien (DEFLO-HYDRO, 2007), nous avons installé deux observatoires acoustiques long terme qui fonctionnent depuis 2005 en Atlantique - le réseau MARCHE - et depuis 2010 dans l'océan Indien - le réseau OHASISBIO.  Ces 2 sites sont labellisés "sites instrumentés" par l'INSU. Chacun est constitué de plusieurs hydrophones distants de plusieurs centaines de kilomètres les uns des autres et couvrant des régions de plusieurs millions de km2.

Comment ?

Les hydrophones autonomes sont immergés entre 800 et 1000 m de profondeur dans le canal SOFAR (tranche d'eau à faible célérité du son, Fig. 2) et enregistrent en continu les ondes acoustiques qui sont générées par les séismes et les éruptions volcaniques sous-marines. Dans le canal SOFAR, ces ondes acoustiques peuvent se propager sur des milliers de kilomètres, avec une très faible atténuation. Un réseau de quelques hydrophones permet ainsi de surveiller une zone géographique extremement vaste (ex. 1000 x 1000 km) et de localiser très précisemment (à 2-3 km près à l'intérieur du réseau) les sources sonores, en l'occurence les séismes, éruptions volcaniques sous-marines ou encore des icebergs.

Par ailleurs, la sensibilité de ces instruments permet de détecter les séismes de faible magnitude qui échappent aux réseaux sismologiques terrestres. Les réseaux mis en oeuvre en Atlantique ou dans l'océan Indien détectent ainsi 30 à 50 fois plus d'évènements que les réseaux terrestres.

Figure 2 : Schéma de mouillage d'un hydrophone autonome dans le canal SOFAR (figure from PMEL/NOAA)

Les observatoires hydroacoustiques

Le Laboratoire ''Domaines Océaniques'' de l'IUEM (UMR6538) a, depuis 2002, réalisé plusieurs expériences hydroacoustiques et met en oeuvre deux réseaux d'hydrophones autonomes, en Atlantique et dans l'océan Indien.

Atlantique

Deux réseaux ont été déployés dans l'Atlantique Nord et Central, de part et d'autre et sur les flancs de la Dorsale Médio-Atlantique, au nord et au sud des Açores (Fig. 4):

  • le réseau SIRENA a été déployé au nord des Açores entre mai 2002 et septembre 2003. Il a permis de détecter et de localiser plus de 3000 évènements le long de la Dorsale Médio-Atlantique, entre 15°N et 60°N.
  • le réseau MARCHE (''Mid-Atlantic Ridge Comprehensive Hydrophone Experiment''), spécifiquement destiné à la surveillance acoustique du chantier MOMAR, a été déployé pendant 3 ans, de 2005 à 2008. Il aura permis d'assurer une surveillance acoustique continue de ce site à l'échelle régionale et de détecter plus de 7000 évènements.

 

Figure 4 : Crises sismiques détectées par les différents réseaux d'hydrophones (sud-Açores, SIRENA et MARCHE) entre février 1999 et juin 2005 (Simao et al., 2010). La zone MOMAR se situe à l'intérieur du réseau MARCHE (étoiles bleues).

Océan Indien

Un troisième réseau de trois instruments a été déployé entre novembre 2006 et janvier 2008, dans l'océan Indien austral. Le dépouillement des données acquises par ce réseau, conjointement à celles provenant des stations hydro-acoustiques permanentes, installées dans l'océan Indien par le CTBTO (Comprehensive Nuclear-Test-Ban Treaty Organization), a révélé près de 11000 évènements acoustiques, dont 4500 craquements d'icebergs.

Depuis 2010, nous maintenons un réseau de 7 à 9 hydrophones, répartis sur 5 sites, appelé OHA-SIS-BIO - Observatoire Hydroacoustique de la Sismicité et de la Biodiversité - avec le double objectif:

  • de caractériser l'activité sismique et volcanique des 3 dorsales de l'océan Indien, dont les taux d'ouverture sont contrastés: ultra-lent (16 mm/an), lent (40 mm/an) et intermédiaire (60-70 mm/an);
  • et de recenser plusieurs espèces menacées de grandes baleines de l'océan austral et de suivre leur migration saisonnière sur plusieurs cycles annuels.

Ces deux objectifs ont en commun d'être dans les mêmes gammes de fréquence (0-120 Hz) et de nécessiter des séries temporelles les plus longues possibles pour être représentatives de l'activité tellurique et biologique dans cette région du globe.  OHASISBIO bénéficie pour son maintien annuel de la présence du N.O. Marion Dufresne, opéré par l'Institut Polaire Paul Emile Victor et qui ravitaille chaque année les îles australes françaises (Crozet, Kerguelen et Amsterdam).

Participants

J.-Y. Royer, J. Perrot, A. Sukhovich, C. Martin, J.-F. D'Eu et DT-INSU

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