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Fixation de l’azote chez la gammaprotéobactérie diazotrophique marine largement répandue Candidatus Thalassolituus haligoni

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Résumé

La diversité et la distribution mondiale des bactéries diazotrophes hétérotrophes (HBD) dans l’océan sont récemment devenues évidentes. Cependant, la compréhension des taux de fixation de diazote (N2) pour ces micro-organismes en grande partie non cultivés pose un défi majeur en raison de leurs exigences de croissance non définies et de la régulation complexe de l’enzyme nitrogénase. Nous avons isolé et caractérisé Candidatus Thalassolituus haligoni. L’analyse de son gène nifH par séquençage d’amplicon a révélé la vaste distribution de Cand. T. haligoni dans les océans Pacifique, Atlantique et Arctique. Les échantillons ont été collectés lors d’études de terrain menées le long des transects GEOVIDE (GEOTRACES GA01) à travers l’Atlantique Nord, canadien ArcticNet (GEOTRACES, GN03) à travers la baie de Baffin, sur le plateau néo-écossais et au niveau de l’archipel arctique canadien. Grâce à des approches combinées de génomique, de protéomique et de physiologie, nous avons confirmé que l’isolat fixe le N2, bien que les facteurs de la régulation de la nitrogénase chez Cand. T. haligoni restent peu clairs. Actuellement, seules deux cultures isolées avec des génomes entièrement séquencés sont connues dans le clade des Oceanospirillales, Parathalassolituus penaei (régionalement limitée) et Cand. T. haligoni (distribution mondiale). Compte tenu de son abondance, sa distribution, sa cultivabilité et la disponibilité de son génome, nous proposons Cand. T. haligoni comme modèle pour les γ-protéobactéries HBD, en particulier du clade des Oceanospirillales.
En outre, comme la fixation de N2 chez Cand. T. haligoni a lieu en présence de nitrate, nous proposons que le clade des diazotrophes Oceanospirillales puisse être un contributeur majeur au budget marin global de fixation de N2.

Figure

Fig. 1. Microscopie électronique à balayage et modèles métaboliques génomiques, protéomiques et assistés par le génome de Cand. T. haligoni.
(A) morphologie cellulaire de l’isolat dans des conditions de fixation de N2 par microscopie électronique à balayage (SeM ; en haut) et microscopie électronique à transmission (teM ; en bas). Grossissement SeM = 17,71 × 103. Les flèches indiquent les flagelles (F) et les granules PhB (PhB).
(B) Carte circulaire protéome-génome dans des conditions appauvries en NO3. En partant de l’anneau le plus interne : Contenu en GC (gris), biais de GC pour les brins avant (vert) et arrière (magenta), CDS des brins avant et arrière (violet clair), et protéines détectées (bleu). Les flèches dans le génome indiquent les gènes d’intérêt [clusters nif, les gènes liés à la fixation N2 sont l’absorption de molybdate et les gènes de transformation (facteurs mod), l’absorption de tRAP-c4, et la synthèse de glutamine] et les protéines détectées correspondantes sont mises en évidence dans les couleurs respectives. Les espaces blancs dans le protéome indiquent les régions non détectées.
(C) Clusters Nif (rouge, bleu et orange) et gènes de fixation N2 associés (gris). Les gènes associés à la fixation N2 comprennent les gènes de glycogène phosphorylase et d’absorption du glycogène. les nombres le long de la ligne indiquent les emplacements des paires de bases dans le génome. Une rupture nucléotidique au centre du diagramme entre 3 598 007 nt et 3 737 467 nt est représentée par la ligne en zigzag en rouge (concaténée). Les clusters sont codés par couleur en fonction des clusters nif associés, les gènes accessoires de ce cluster étant indiqués par des teintes de couleur respectives.
(D) Schéma métabolique simplifié de l’isolat basé sur l’annotation du génome. Le schéma a été créé à l’aide du serveur RASt et de BioRender.

 

Référence

Sonja A. Rose, Brent M. Robicheau, Jennifer Tolman, Debany Fonseca-Batista, Elden Rowland, Dhwani Desai, Jenni-Marie Ratten, Ella Joy H. Kantor, André M. Comeau, Morgan G.I. Langille, Jon Jerlström-Hultqvist, Emmanuel Devred, Géraldine Sarthou, Erin M. Bertrand and Julie La Roche. « Nitrogen fixation in the widely distributed marine γ-proteobacterial diazotroph Candidatus Thalassolituus haligoni« . Science Advances Volume 10, Issue 31 (Aug 2024)

https://www.science.org/doi/epdf/10.1126/sciadv.adn1476

Un puits de CO₂ dans le désert marin du Pacifique Sud

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Quatre collègues du LEMAR (Jérémie Habasque, Frédéric Le Moigne, Anne Lebourges-Dhaussy et Géraldine Sarthou) ont participé à une vaste étude internationale basée sur les résultats de la campagne TONGA. Cette étude, dirigée par Sophie Bonnet (MIO) et Cécile Guieu (LOV) porte sur le mécanisme de fertilisation naturelle par le fer dans l’océan par les sources hydrothermales et vient d’être publiée dans le prestigieux journal Science.

Communiqué de presse

Un processus nouvellement identifié de fertilisation naturelle en fer dans l’océan alimente des puits régionaux de CO₂. C’est ce que démontre une étude publiée le 25 mai dans Science et co-écrite par 25 chercheurs et chercheuses issus du projet Tonga piloté par deux chercheuses de l’IRD et du CNRS, regroupant plus de 90 scientifiques de 14 laboratoires français basés en métropole et en Nouvelle-Calédonie, et de 6 universités internationales. Dans cet article, l’équipe de recherche a étudié les volcans sous-marins peu profonds de l’arc volcanique de Tonga (Pacifique Sud), qui relarguent des fluides hydrothermaux riches en fer, un micronutriment essentiel à la vie. Une partie du fer émis dans ces fluides atteint la couche éclairée de l’océan, celle où se fait la photosynthèse c’est-à-dire la fixation du CO₂ par les microalgues du plancton. Cela stimule fortement l’activité biologique dans cette zone, notamment celle des diazotrophes1, créant ainsi une vaste efflorescence d’environ 400 000 km2, véritable oasis de vie au milieu du désert marin du Pacifique Sud, et une séquestration accrue de CO2 vers l’océan profond.

Pour documenter le lien mécaniste entre l’apport de fer par le volcanisme sous-marin et la réponse de la communauté planctonique de surface, les chercheurs et chercheuses ont combiné des observations acoustiques, chimiques, physiques et biologiques acquises au cours de l’expédition océanographique Tonga, réalisée en 2019 à bord du navire L’Atalante de la Flotte océanographique française opérée par l’Ifremer.

Dans cette étude, les scientifiques démontrent que les fluides émis le long de l’arc volcanique de Tonga ont un impact considérable sur les concentrations en fer dans la couche éclairée. Cet enrichissement stimule l’activité biologique, ce qui entraîne la formation d’une vaste oasis de vie riche en chlorophylle, dominée par le diazotrophe Trichodesmium. En comparaison avec les eaux adjacentes non fertilisées en fer, l’activité des diazotrophes y est 2 à 8 fois plus élevée et les flux de séquestration de carbone dans l’océan profond 2 à 3 fois. Ces résultats révèlent un mécanisme de fertilisation naturelle par le fer dans l’océan par les sources hydrothermales, qui alimente des puits régionaux de CO2 atmosphérique.

Les diazotrophes planctoniques sont des organismes microscopiques omniprésents dans l’océan. Ils jouent un rôle crucial puisqu’ils agissent comme des engrais naturels en fournissant de l’azote nouvellement disponible à la biosphère de l’océan de surface, un nutriment essentiel mais rare dans la plupart de nos océans. Le Pacifique Sud subtropical occidental est un haut lieu de l’activité des diazotrophes, avec une contribution estimée à 21% de l’azote mondial apporté par ce processus.

On sait que l’apport de fer par le biais des dépôts atmosphériques contrôle la biogéographie des diazotrophes à grande échelle, mais ces apports éoliens sont extrêmement faibles dans cette région éloignée. Cela suggère la présence d’autres processus de fertilisation en fer, tel que celui mis en évidence ici pour la première fois. L’identification de ces processus est de la plus haute importance car les diazotrophes ont récemment été identifiés comme des moteurs clés de la future fixation de CO2 par l’océan en réponse au changement climatique.

 

Référence
Sophie Bonnet, Cécile Guieu, Vincent Taillandier, Cédric Boulart, Pascale Bouruet-Aubertot, Frédéric Gazeau, Carla Scalabrin, Matthieu Bressac, Angela N. Knapp, Yannis Cuypers, David González-Santana, Heather J. Forrer, Jean-Michel Grisoni, Olivier Grosso, Jérémie Habasque, Mercedes Jardin-Camps, Nathalie Leblond, Frédéric Le Moigne, Anne Lebourges-Dhaussy, Caroline Lory, Sandra Nunige, Elvira Pulido-Villena, Andrea L. Rizzo, Géraldine Sarthou, Chloé Tilliette.
Institut méditerranéen d’océanologie (CNRS/Aix-Marseille Université/IRD/Université de Toulon), Laboratoire d’océanographie de Villefranche (CNRS/Sorbonne Université), Laboratoire Adaptation et diversité en milieu marin (CNRS/SU), Laboratoire d’océanographie et du climat : expérimentations et approches numériques (CNRS/IRD/MNHN/SU), Laboratoire Geo-ocean (CNRS/Ifremer/UBO), Laboratoire des sciences de l’environnement marin (CNRS/IRD/Ifremer/UBO), Institut de la Mer de Villefranche (CNRS/SU).
Natural iron fertilization by shallow hydrothermal sources fuels diazotroph blooms in the Ocean, Science, 25 mai 2023. DOI: 10.1126/science.abq4654.

Radiolaires et cycle du silicium : les travaux de Natalia Llopis-Monferrer sous les projecteurs !

L’American Geophysical Union (AGU) a déclaré « Research Spotlight » le récent article de Natalia Llopis-Monferrer paru dans « Global Biogeochemical Cycles » sur l’importance des radiolaires (organismes planctoniques marins) dans le cycle du silicium de l’océan mondial.

Ces récents travaux réévaluent le rôle de ces minuscules protistes qui pourraient contribuer à près d’un cinquième de la production mondiale de silice par des organismes marins.

Natalia Llopis-Monferer, de nationalité espagnole, est étudiante au LEMAR (UMR 6539) de l’IUEM-UBO. Elle est co-encadrée par Aude Leynaert (CNRS), Fabrice Not (SBR) et Paul Tréguer (UBO).

Lire l’article d' »EOS » (Sciences News by AGU)

Les squelettes d’éponges, un puits important de silicium dans l’océan

Le silicium (Si) est un élément essentiel dans le fonctionnement biogéochimique et écologique de l’océan. On pense que le cycle marin actuel du Si est en équilibre, c’est-à-dire que les apports à l’océan égalisent les sorties. Les apports proviennent majoritairement des rivières, et les sorties étaient considérées comme résultant essentiellement de l’enfouissement des squelettes de diatomées dans le sédiment. Dans cet article, nous montrons que des organismes non phototrophes, tels que les éponges et les radiolaires, avec leur squelette de silice, participent également de façon significative à l’enfouissement de Si au fond de l’océan. L’examen microscopique et le dosage des sédiments prélevés sur 17 sites à travers le monde ont révélé que le squelette des éponges est exceptionnellement résistant à la dissolution, et était passé inaperçu dans les inventaires biogéochimiques des sédiments. La conservation des spicules d’éponges dans les sédiments est de 45,2 %, alors qu’il est seulement de 6,8 % pour les tests de radiolaires et de 8,0 % pour les frustules de diatomées. Au total, les éponges séquestreraient 1,71 Tmol de Si an-1. Les radiolaires auraient une contribution minime avec 0.09 Tmol de Si an−1.  Collectivement, ces deux organismes non phototrophes augmentent le puits de silice de 28% et contribue à rétablir l’équilibre du cycle de la silice dont les apports dépassaient les sorties.

References

Maldonado, M., López-Acosta, M., Sitjà, C., García-Puig, M., Galobart, C., Ercilla, G., & Leynaert, A. (2019). Sponge skeletons as an important sink of silicon in the global oceans. Nature Geoscience. https://doi.org/10.1038/s41561-019-0430-7

 

Accédez à la publication

 

Cette publication a fait l’objet d’un article dans Le Monde, retrouvez-le ici

Séminaire de Daniel Conley (Lund University, Sweden) le 29 avril prochain

Le 29 avril prochain à 10h en salle A215 (IUEM) nous accueillerons Daniel Conley de l’Université de Lund en Suède qui viendra nous présenter ses travaux portant sur le thème suivant:

Constraining variations in the global biogeochemical silica cycle through geologic time.

Résumé de sa présentation :

Il est largement reconnu que l’émergence et l’expansion de la biominéralisation du silicium dans les océans ont affecté la concurrence évolutive pour le Si dissous (DSi). Cela a entraîné des changements dans les cycles biogéochimiques mondiaux du silicium, du carbone (C) et d’autres nutriments qui régulent la productivité des océans et, en fin de compte, le climat. Cependant, une série de découvertes très récentes en géologie et en biologie suggèrent que les premiers impacts biologiques sur le cycle global du Si ont probablement été causés par les procaryotes au cours de l’Archéen avec de nouvelles diminutions du DSi océanique avec l’évolution de la biosilicification du squelette à grande échelle et généralisée, bien avant le modèle actuel. Notre projet entremêle géologie et biologie et créera de nouvelles connaissances sur les interactions entre la biosilicification des organismes et l’environnement et sur la façon dont ces interactions ont évolué au cours de l’histoire de la Terre. Ensemble, ces analyses géologiques et biologiques fourniront de nouvelles perspectives sur les événements clés durant les périodes de réduction du DSi, qui réorganisent la distribution du carbone et des nutriments, modifiant le flux énergétique et la productivité dans les communautés biologiques des anciens océans.

Venez nombreux!

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Lucie CASSARINO

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