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Claire Geslin, enseignant chercheur en microbiologie au LM2E

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Que faisais-tu avant de venir à l’IUEM ?

Avant d’intégrer l’IUEM j’ai obtenu mon Diplôme d’Etudes Approfondies (DEA) en microbiologie en 1998 à la Station Biologique de Roscoff. C’était un diplôme cohabilité avec Brest, Caen et Rennes. Le stage, encadré par Christian Jeanthon, s’est déroulé au laboratoire de bactériologie marine, dirigé par Daniel Prieur. Le sujet de recherche portait sur l’étude de bactéries isolées de sources hydrothermales océaniques et sur leurs interactions avec les métaux. En 1999, le laboratoire a migré de Roscoff vers Brest et intégré l’IUEM. Nous formions une équipe de microbiologie au LEMAR. Cette même année, j’ai débuté une thèse financée par l’UBO et un industriel. L’objectif de ma thèse était de rechercher des virus d’archées hyperthermophiles des environnements hydrothermaux océaniques profonds ; cela n’avait jamais été documenté auparavant.

En 2003, mon expérience post-doctorale en Pennsylvanie, à l’Université de Pittsburgh chez le Pr Roger Hendrix, m’a permis de travailler sur un projet portant sur l’analyse structurale de bactériophages isolés d’E. coli. C’est un modèle moins exotique que les micro-organismes extrémophiles mais pour lequel de nombreux outils de travail étaient disponibles.

Cette même année, j’ai décroché le concours de maître de conférences. Pour la petite anecdote, je passais le concours pour le poste de maître de conférence un jeudi, et le lendemain je m’envolais vers les États-Unis pour mon post doc. Je devais partir pendant deux ans de l’autre côté de l’Atlantique mais je suis revenue à Brest, 5 mois après, pour assurer la rentrée en septembre 2003.

Pourquoi as-tu choisi l’IUEM ?

Au départ, j’ai suivi le laboratoire de microbiologie dirigé par Daniel Prieur pour ma thèse et c’est comme cela que je suis arrivée à l’IUEM. J’y suis restée grâce à l’obtention de mon poste de maître de conférences et pour poursuivre, au LM2E, ma thématique de recherche sur les virus hydrothermaux marins. Ce sont des virus qui vont infecter des micro-organismes marins (bactéries et archées) qui se développent à de très hautes températures (70-90°C), sans oxygène et sous forte pression hydrostatique. Ces virus sont confrontés à des conditions extrêmes. Le but premier de ma thèse était de savoir s’il existait de tels virus. Il s’avère qu’au bout d’un an et demi de thèse, j’ai trouvé un virus : le premier isolé du système hydrothermal océanique : Pyrococcus Abyssi Virus n°1 (PAV1). Cette découverte, m’a permis d’être lauréate du Prix Bretagne Jeune Chercheur en 2005 (section Sciences de la vie et de l’environnement). Cette reconnaissance de mon travail de recherche par la région Bretagne a fait un peu connaître cette thématique de recherche auprès du grand public.

© Ifremer – Campagne BIG – 2010

Que fais-tu à l’IUEM ?

Je continue à travailler sur cette thématique, sur cet environnement : les sources hydrothermales océaniques profondes où j’y étudie la diversité virale. A ce jour, seulement 11 virus hydrothermaux marins sont caractérisés dans le monde. Au LM2E, par le travail que je mène avec les étudiants, nous en avons caractérisé 6 sur les 11 (3 virus de bactéries et 3 virus d’archées). Nous pouvons même dire que nous sommes les seuls à avoir isolé et caractérisé des virus d’archées hyperthermophiles marines.
C’est une thématique très spécifique. Grâce à notre labo (UBO, CNRS et Ifremer) nous avons accès aux campagnes océanographiques et aux précieux échantillons hydrothermaux, ce qui n’est pas donné à tout le monde.

En 2020, nous avons publié un travail sur un virus de méthanogène. Les archées méthanogènes jouent un rôle primordial dans le cycle global du carbone en produisant du méthane.
Ce virus présente une morphologie « tête-queue », démontrant sans équivoque, pour la première fois, que ce morphotype classiquement retrouvé dans le monde viral bactérien peut se propager dans des conditions extrêmes à des températures de plus de 90°C. En effet, avant cette étude, aucun virus tête-queue (caudovirus) n’avait été isolé de micro-organismes hyperthermophiles, soulevant des questions sur la thermostabilité de ce morphotype (Thèse Sarah Thiroux 2019). C’est un des exemples de résultats majeurs obtenus ces dernières années dans le cadre de thèse que j’ai encadrées.

Une autre activité importante dans mon emploi du temps est l’enseignement.
Depuis 2003, en tant que maître de conférences, j’enseigne en Licence (L2 et L3) et en Master (M1 et M2 ; principalement dans le Master de microbiologie fondamentale et appliquée (MFA) et un peu dans les Masters des Sciences de la Mer et du Littoral (SML), formations dispensées à l’UBO, IUEM et intégrées à l’Ecole doctorale des Sciences de la Mer et du littoral (EDSML).
Mes enseignements portent principalement sur la physiologie microbienne, la génétique microbienne, l’écologie et biologie des extrêmophiles, et aussi bien évidemment la virologie.
J’encadre également des étudiants en master et en thèse sur mes thématiques de recherche.

© LM2E

As-tu des anecdotes professionnelles à nous raconter ?

Avec mon sujet de thèse, j’ai été parachutée sur un sujet de virologie, on ne travaillait pas sur cette thématique au laboratoire. Daniel Prieur et Patrick Forterre (Professeur à l’Université d’Orsay avec lequel notre laboratoire collabore) m’ont envoyée pendant 1 mois au Max Planck Institute à Martinsried en  Allemagne pour me former à la virologie aux côtés de Wolfram Zillig, un chercheur qui dans les années 80 a été l’un des premiers à travailler sur le troisième domaine du vivant : Archaea. Wolfram Zillig a également fait un séjour dans notre labo à Brest, c ‘était vraiment enrichissant pour moi. D’ailleurs, les couloirs de l’IUEM doivent encore se rappeler de son tonitruant « Clear » come, quand il m’appelait !

J’ai été embauchée en 2003 donc finalement assez vite après ma thèse. Et puis, à l’époque je devais faire un peu jeunette. J’arrive pour mon premier cours en amphi, un quart d’heure avant le début du cours pour bien me préparer. J’étais assez stressée, alors pour me rassurer j’avais apporté quelques livres de microbiologie. Je les pose sur le bureau sur l’estrade, et deux étudiants arrivent et me disent « Oh super chouette tes bouquins ! », et commencent à les feuilleter. On discute un petit peu et le cours allant commencer, ils vont s’installer dans l’amphi. J’ai vu à leurs têtes qu’ils n’avaient pas compris que j’étais la prof et qu’ils pensaient que j’étais une étudiante comme eux.  Et bien, ils ont été très très attentifs pendant les deux heures de cours. Ça ne m’arrive plus maintenant, on m’appelle Madame Geslin (rires).

Enfin une autre fois, lors d’un pot organisé au labo, il fallait faire un gâteau. Je ne suis pas très bonne cuisinière. J’ai donc acheté une préparation toute faite. Je l’ai faite cuire, mais pas assez. J’ai quand même apporté le gâteau au citron et l’ai mis au milieu des autres ni vu ni connu, parce qu’il était trop tard pour que je recommence. Au final tout le monde l’a adoré, et quand certains se sont enquis du nom du cuisinier, quelqu’un a dit que c’était moi. Plusieurs collègues m’ont demandé la recette de ce fameux gâteau au citron…. J’ai fini par leur donner mon secret : l’ouverture d’un sachet.

© Ifremer – Campagne BIG – 2010

Quel est ton plus beau souvenir de boulot ?

Je pense que le plus beau restera le moment où l’on m’a annoncé que c’était moi qui avais eu le concours pour le poste de maître de conférences. C’était vraiment un sentiment unique.

Autrement c’est lors des campagnes océanographiques. En 1999, j’ai eu l’opportunité de participer à la campagne océanographique AMISTAD, avec le navire l’Atalante et le sous-marin le Nautile. 21 plongées sont prévues avec le Nautile : 21 chercheurs et de la place pour les étudiants. Tout est réglé comme du papier à musique, s’il y a un problème technique qui empêche une plongée, tu peux perdre ton tour ! Le jour de ma plongée, il y a eu un problème électronique sur le Nautile, qui finalement a été résolu un peu plus tard. Alors vient le moment d’enfiler la combinaison jaune, et de partir pour 8 heures à 2300 m de profondeur. J’étais émerveillée par ce que je voyais ! Dans ce genre de plongée, on est enregistré pour pouvoir revenir sur ce qu’on a vu après. Et sur mon enregistrement on entendait uniquement des : « ohlala que c’est beau ! Vous avez vu ??? ».

J’ai eu une autre expérience de plongée en Atlantique cette fois, pendant la campagne EXOMAR, à 2000 m de profondeur en 2005. J’ai eu une chance dingue de pouvoir voir de près l’environnement sur lequel je travaille.

Quels sont tes centres d’intérêt ?

J’adore lire un bon roman en buvant une tasse de thé. De bons repas entre amis c’est essentiel. Les voyages, les voyages forcément. Et j’aime la mer aussi, bien évidemment.

As-tu une devise ?

Je n’ai pas de devise. Mais en ce moment je lis Pas Mieux ! d’Arnaud Le Guilcher et on y trouve cette citation de Jean-Luc Godart :

« Van Gogh a cherché un peu de jaune

quand le soleil a disparu… Faut chercher mon vieux. Faut chercher… »

Crédits photos

Ifremer

LM2E

Contact

Claire Geslin / UBO

Yann Moalic, Post-doctorant en microbiologie au LMEE

Que faisais-tu avant de venir à l’IUEM ?

Après un master en bio-informatique, j’ai fait ma thèse à l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (ANSES) à Ploufragan entre 2004 et 2008. Je travaillais sur l’intégration du rétrovirus endogène porcin dans le génome de cellules humaines infectées in vitro. Ensuite, j’ai fait un postdoctorat au Centre Ifremer de Brest au sein du laboratoire Environnement profond. J’étais chargé de mettre en place une approche de modélisation en réseau pour caractériser le flux génique entre les populations de divers organismes marins jusqu’en 2012.

Pourquoi as-tu choisi l’IUEM ?

J’ai intégré le LMEE en 2013 en tant qu’enseignant-chercheur contractuel. Mon souhait était de continuer à travailler sur les environnements profonds mais plus à l’échelle moléculaire comme à l’époque de mon doctorat. J’ai exercé cette fonction pendant 5 ans jusqu’en juin 2018 et depuis septembre 2019, j’ai un contrat de postdoc sur un projet ANR qui vise à mieux comprendre le métabolisme des acides ribo-nucléiques (ARN, expression des gènes) chez les Archées.

Que fais-tu à l’IUEM ?

Mon activité princpale concerne la création de mutants chez le modèle archée Thermococcus barophilus. J’ai participé à l’amélioration de l’outil génétique qui permet d’enlever des gènes dans cette Archée pour mesurer et évaluer leurs rôles fonctionnels. Ce modèle de laboratoire permet de comprendre comment cette espèce est adaptée à la vie sous pression puisque son habitat naturel se trouve à 3500 mètres de profondeur, au niveau de la ride Médio-Atlantique. Son optimum de croissance est de 400 bars ; le laboratoire dispose d’incubateurs haute pression et haute température qui permettent de reproduire cet environnement. Cela permet d’identifier les gènes qui sont régulés par l’effet de la pression hydrostatique puis nous recherchons leur rôle fonctionnel par mutagénèse.
Je collabore également avec les collègues du laboratoire côté Ifremer sur la stabilité des génomes face à ces environnements extrêmes (haute pression et haute température). J’ai été amené à créer des mutants dépourvus d’enzymes impliquées dans la réparation de l’ADN et j’utilise les nouvelles technologies de séquençage et mes compétences en bioinformatique pour mesurer l’impact génomique globale de leurs fonctions.

Enfin, je suis également sollicité par mes collègues écologistes pour mes compétences en analyse réseaux qui est une approche pertinente pour appréhender la complexité des interactions microbiennes au sein des écosystèmes.

Je suis aussi correspondant communication du laboratoire en binôme avec Stéphanie Renard, gestionnaire de notre unité.

As-tu des anecdotes professionnelles à nous raconter ?

A la fin de ma thèse, j’habitais Morlaix et je faisais le trajet en train jusqu’à la gare de St Brieuc. De là, le Zoopôle de Ploufragan avait mis en place un système de navette qui était assuré par des taxis briochins. Durant ces trajets, j’avais donc souvent l’occasion de parler de mon travail et de m’exercer à la vulgarisation scientifique. C’était en 2006/2007 pendant l’épizootie de grippe aviaire dont Ploufragan était le laboratoire de référence européen chargé d’analyser tous les échantillons suspects de France. Les chauffeurs étaient donc plutôt réceptifs à ce qui se passait dans mon laboratoire. Un jour, il y en a un qui m’a dit « vous les chercheurs, vous êtes comme les peintres, vous devenez célèbres après votre mort ». C’était sur la ton de la plaisanterie et j’avoue que ça m’a fait rire sur le coup mais, ça m’a aussi fait réfléchir sur le métier de chercheur en tant qu’activité quotidienne et la perception que la société peut avoir de cette profession. Je n’ai pas choisi d’être chercheur pour être célèbre mais si ça arrive un jour, j’espère que je serai encore vivant. Une chose est certaine, c’est que cette comparaison entre un chercheur et un artiste m’a aidé à prendre conscience de l’importance du côté créatif du métier de chercheur. Cela m’a aussi souvent aidé à tenir le coup quand les résultats espérés se faisaient attendre, que ce soit au laboratoire ou de la part de l’ESR.

Quel est ton plus beau souvenir de boulot ?

J’ai plein de bon souvenirs mais le plus improbable a été de photographier en direct pendant un quart ROV, un nudibranche à 850m de fond dans le golfe de Gascogne (cf photo)

Quels sont tes centres d’intérêt ?

En dehors de la science, j’ai une vie de famille bien remplie. Mais avec le peu de temps qu’il me reste je joue de la guitare et je profite du SUAPS pour faire de la Savate.

As-tu une devise ?

« never give up, never surrender » Quincy Taggart

et

« Wer immer strebendsich bemüht, den können wir erlösen » Goethe.

Contact

Yann Moalic