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Émilie Bruand, Chargée de recherche CNRS en pétrologie-géochimie à Geo-Ocean

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Que faisais-tu avant de venir à l’IUEM ?

J’ai fait ma thèse en Autriche à l’Université Karl-Franzen de Graz (Autriche) sur l’étude de roche du massif montagneux du Chugach et Saint Elie (Alaska). Il s’agissait de reconstruire l’histoire de cette chaîne de montagnes exceptionnelle qui s’est formée dans une zone de subduction. Cette région a été choisie pour la nature des roches qu’on y trouve et le caractère unique du relief. En effet, elle forme la plus haute chaîne de montagnes côtières de la planète. Ensuite, je suis partie faire un Postdoc en Angleterre à l’université de Portsmouth pendant 4 ans puis moins d’un an à l’université d’Oxford. Lorsque je suis arrivée en Angleterre, j’ai travaillé sur un projet intitulé « When on Earth did plate tectonics begin? ». Durant ces années, j’ai étudié des minéraux pas plus grand qu’une épingle d’aiguille à coudre, qui sont des petites capsules de temps (datation) capables d’incorporer un nombre d’éléments chimiques important. J’ai pu, grâce à ces minéraux, étudier l’histoire de la croûte océanique et continentale à travers les temps géologiques. L’analyse de ces minéraux se fait à de très petites échelles (1-50 microns) grâce à des instruments de pointe tels que ceux présents sur le site du technopôle (Laser couplé à des spectromètres de masses, microsonde, microscope électronique à balayage).

Après ces postdocs, j’ai obtenu un fellowship à l’Université Clermont-Auvergne. En 2017, j’ai réussi le concours de chargé de recherche au laboratoire de géologie de Clermont-Ferrand où je suis restée 5 ans. Je travaillais sur la formation des premiers continents de la Terre (2,5 à 4,5 milliards d’années) et le développement de nouvelles analyses chimiques et isotopiques à l’échelle du microns. J’ai intégré Geo-Ocean en 2022.

Pourquoi as-tu choisi l’IUEM ?

La plateforme analytique du Pôle spectrométrie Océan (PSO) et de la microsonde Ouest font de l’IUEM un endroit idéal pour développer de nouveaux axes dans mes recherches. Mon travail s’intègre pleinement dans 2 des équipes actuelles de Geo-Ocean (GIPS et CYBER) qui étudient les croûtes océanique et continentale ainsi que la géodynamique terrestre. Je souhaiterais également commencer des collaborations avec l’équipe ASTRE (sédimentologie). En particulier, j’aimerais appliquer mes outils géochimiques aux sédiments, qui sont le résultat de l’érosion des continents, afin de reconstituer les pièces manquantes de l’histoire de la Terre, en particulier son histoire ancienne. La géologie bretonne variée et riche m’intéresse également et j’ai déjà commencé àtravailler avec des collègues de Geo-Ocean (Lorraine Tual et Christine Authemayou) sur les océans « disparus » de la chaîne hercynienne bretonne. Ce sont toutes ces raisons qui m’ont amenées à intégrer l’IUEM et qui en font un endroit privilégié pour ma recherche.

Que fais-tu à l’IUEM ?

J’ai un projet ANR JCJC qui a commencé en 2021 avec un thésard, Théo Biget, et qui occupe une bonne partie de mon temps. Il s’appelle Amnesia car je travaille sur la Terre ancienne et en particulier la croûte continentale qui est « un peu » amnésique sous l’effet des différents processus géologiques qu’elle a subis au cours du temps. L’idée est de développer des outils en étudiant les minéraux et leurs chimies, résistants à ces processus secondaires afin de retrouver les indices de l’histoire des premiers continents disparus. Théo travaille sur une section de croûte continentale en Calabre (Italie) et l’autre partie du projet concerne l’étude de deux terrains anciens en Afrique du Sud et en Australie que j’ai échantillonnés entre 2018 et 2019.

Le principal de mon travail de laboratoire se déroule sur microscope (optique ou électronique), sur microsonde et spectromètre de masse. Depuis mon arrivée à Geo-Ocean, j’encadre des stagiaires de M1 et M2 du Master Géosciences et je suis en charge des séminaires du laboratoire (en binôme avec Natalia Vazquez) et du volet communication (en binôme avec Anne Briais). Je suis également associate éditeur de GSA bulletin et membre de la société française de minéralogie et cristallographie.

As-tu des anecdotes professionnelles à nous raconter ?

En géologie, les missions de terrain génèrent souvent des situations cocasses… Durant ma première mission de terrain en Alaska, mon superviseur de thèse et le pilote de l’avion, qui devaient nous déposer sur un site inaccessible par voie terrestre, nous ont laissé moi et ma collègue thésarde toutes seules au pied d’un glacier. Ils devaient aller repérer le site d’atterrissage et la faisabilité de la manœuvre. En nous laissant dans cet endroit loin de tout (2h d’avion de la première ville), ils nous ont lancé deux sacs de couchage, une boîte d’allumettes et un pepper spray. Ils nous ont dit qu’ils partaient en repérage et que si l’avion se crashait, nous en aurions besoin en cas de non retour de leurs part. Nous les avons attendus durant 2h interminables sur la plage. Finalement, ils avaient réussi à trouver un endroit où atterrir prêt du lieu qui nous intéressait. Happy end ! À noter que la plage en question était traversée par des empreintes fraîches d’ours bruns…

Quel est ton plus beau souvenir de boulot ?

Les paysages désertiques d’Australie dans la région de Pilbara. Nous dormions à la belle étoile sur des lits de camps. Je m’endormais tous les soirs avec la croix du sud. C’était magique !

Quels sont tes centres d’intérêt ?

Le vélo, la randonnée, la natation, le sport en général et le fromage.

As-tu une devise ?

« Shoot for the moon, even if you miss it, you’ll land among the stars » Oscar Wilde.

Crédit photos

Émilie Bruand / CNRS

Jean-Daniel Champagnac

Contact

Émilie Bruand / CNRS

Anne Briais, Chercheuse CNRS en géodynamique à Geo-Ocean

Que faisais-tu avant de venir à l’IUEM ?

J’ai obtenu un doctorat à Sorbonne Université (anciennement Paris VI – UPMC) tout en effectuant mes recherches au laboratoire de tectonique de l’Institut de physique du globe de Paris (IPG) où j’ai travaillé sur l’ouverture de la mer de Chine du sud. C’était un sujet de géosciences marines au sein d’un laboratoire qui étudiait la tectonique en Asie. C’est à cette occasion-là que j’ai fait mes 1ères campagnes en mer après avoir fait le choix du domaine marin et non du terrain. Je suis allée en Postdoc à l’Université de Rhode Island aux États-Unis puis j’ai fait un 2ème post doc au National Oceanographic Centre (NOC) à Southampton, anciennement Institute of oceanographic sciences à Wormley. Lors de ces postdocs, j’ai travaillé sur les dorsales océaniques actives. Puis, j’ai été recrutée au CNRS en 1992 en tant que chargée de recherche au Laboratoire d’études en géophysique et océanographie spatiales (LEGOS). C’était le début de l’océanographie par satellite. Cette nouvelle technique a permis de faire des cartes globales du champ de gravité. Indirectement, nous pouvions étudier la dynamique des dorsales océaniques sur 200 millions d’années. Ensuite, j’ai continué à travailler avec les données satellites et les données de campagnes en mer au Laboratoire de dynamique terrestre et planétaire toujours à l’Observatoire Midi-Pyrénées (OMP) puis au Géosciences Environnement Toulouse (GET).

Pourquoi as-tu choisi l’IUEM ?

J’ai décidé de rejoindre Brest car je travaillais plus avec des collègues du laboratoire Geo-Ocean (anciennement LGO) qu’avec des collègues toulousains. Mes thématiques de recherche sont le cœur de métier de Geo-Ocean.

Que fais-tu à l’IUEM ?

Mes recherches sont centrées sur la dynamique des dorsales océaniques et des rifts et l’interaction avec la circulation du manteau. De manière générale, j’apporte des connaissances sur le fonctionnement de la planète et la tectonique des plaques. Dans un cadre plus terre à terre, les résultats de mes recherches aident à comprendre l’hydrothermalisme et donc localiser les ressources minières potentielles, ainsi que les limites tectoniques sources de séismes.

Au sein de l’International Ocean Discovery Program (IODP), je suis retournée en mer de Chine en 2014 et 2017 pour des campagnes de forage qui ont confirmé mes résultats de thèse : nous avons pu dater les fonds marins en mer de Chine et apporter des contraintes sur les âges du rifting et de l’ouverture océanique.

À l’heure actuelle, je suis co-cheffe de l’expédition IODP395 au sud de l’Islande prévue en 2020 qui a été reportée en 2023. Nous allons mieux comprendre l’interaction entre le point chaud de l’Islande et la dorsale médio-atlantique nord. C’est une campagne océanographique sur le JOIDES Resolution, navire de forages scientifiques.

Un autre grand projet en cours est l’étude de la dorsale sud est indienne au sud de la Tasmanie. J’ai été cheffe de mission de la campagne STORM (South Tasmania Ocean Ridge and Mantle) en 2015. Pendant cette campagne, nous avons levé des cartes bathymétriques dans des zones jusqu’ici inconnues, en particulier à cause de la météo.

Je participe également à d’autres recherches de collègues brestois, par exemple avec Marcia Maia dans l’atlantique équatorial.

Je fais aussi de l’enseignement sur les dorsales et la géodynamique en licence et en M1 du Master Géosciences Océan.

As-tu des anecdotes professionnelles à nous raconter ?

J’ai soutenu ma thèse le jour de la chute du mur de Berlin.

À la fin de ma 1ère campagne en mer, le N/O Jean Charcot devait débarquer à Jakarta et pour des raisons politiques, il n’a jamais été autorisé à accoster. Nous n’avons pu prendre l’avion qu’une semaine après depuis Singapour.

Pendant la campagne STORM, le mauvais temps était tel que le frigo de la cafet a basculé et a été retrouvé sur le ventre malgré l’amarrage et les attaches. C’était la 1ère fois que ça arrivait sur l’Atalante !

Quel est ton plus beau souvenir de boulot ?

Beaucoup de bons moments sur les campagnes en mer, par exemple un rayon vert lors d’une campagne dans l’océan indien, des albatros dans le grand sud, ou un poulpe à oreilles suivi à plus de 4000 mètres de fond depuis le Nautile.

Le tour complet de l’île de Pâques au petit matin à la fin de la campagne Pacantarctic 2.

Quels sont tes centres d’intérêt ?

Les voyages et la danse.

As-tu une devise ?

Il faut savoir ce que l’on veut dans la vie.

Crédit photos

Georges Ceuleneer / Campagne STORM

IODP

Contact

Anne Briais / CNRS

 

Christine Authemayou, Maître de conférences en tectonique et géomorphologie au LGO

Que faisais-tu avant de venir à l’IUEM ?

J’ai fait ma thèse à Aix en Provence au laboratoire du Cerege (Centre européen de recherche et d’enseignement des géosciences de l’Environnement) de 2002 à 2005. L’objet de cette thèse était d’étudier l’activité de failles sismiques dans la chaîne du Zagros en Iran. J’ai ensuite fait un postdoc à Lausanne en Suisse jusqu’en 2008 sur l’étude de l’activité de failles au Guatemala puis j’ai été recrutée comme maître de conférences à l’UBO en septembre 2008.

Pourquoi as-tu choisi l’IUEM ?

Ce sont les thématiques de recherche en géosciences du LGO qui m’ont attirées. Je souhaitais apporter mon savoir-faire et mes connaissances de terrain pour faire un pont entre les recherches dans le domaine marin et le domaine côtier terrestre. J’étais aussi attirée par la dynamique de l’IUEM,  la dimension humaine du LGO et ses interactions avec les autres unités de l’Institut, propices au développement de projets et à la communication entre scientifiques.

Que fais-tu à l’IUEM ?

Une partie de mes activités est dédiée à l’enseignement, à la fois en licence et en Master SML. Je réalise des cours magistraux, des travaux dirigés (TD) et des stages de terrain qui sont pour moi primordiaux à la formation de futurs géologues. Depuis 2007, j’ai repris la responsabilité du Master Géosciences océan.

Côté recherche, mes objectifs sont d’étudier les déformations de la croûte terrestre grâce à des marqueurs (paléo-rivages soulevés, rivières, plans de failles…) observés en surface au niveau des marges et de comprendre les processus responsables de ces déformations. Actuellement, je travaille sur 2 chantiers impliquant l’étude de récifs coralliens soulevés en Indonésie et à Cuba. Ces deux zones sont localisées sur des limites de plaques tectoniques très actives. Les objectifs sont à la fois de mieux comprendre la géodynamique de ces zones, mais aussi de déterminer les différents facteurs externes qui contrôlent la morphogénèse de ces terrasses coralliennes et de quantifier l’érosion de ce type de côtes.

Equipe franco (LGO-M2C-IsTerre-LPG) cubaine (IGP) au cours du terrain de novembre 2018 (financement LabexMER).

Enfin, je suis correspondante communication pour le LGO, en binôme avec Aurélie Penaud.

As-tu des anecdotes professionnelles à nous raconter ?

En Indonésie, nous devons parfois échantillonner dans des zones sensibles. Notamment en juin 2018, nous devions échantillonner dans un site sacré d’un village traditionnel de l’île de Sumba qui pratique une religion animisme appelée Marapu. Pour le prélèvement, il a fallu faire un rituel religieux pour demander l’autorisation aux esprits, leurs ancêtres. Nous avons du également donner de l’argent coincé entre la pierre et le marteau de géologue, le temps de la prière pour dédommager le sacrifice du lieu.

 

Mission de terrain à Sumba (Indonésie) en juillet 2018 : collaboration franco (LGO-M2C-IsTerre-LPG) indonésienne (LIPI) sur financements INSU-CNES.

J’ai d’autres anecdotes plus anciennes, surtout lors des mes terrains au Guatemala, car avec les croyances Mayas et la peur des exploitations minières, il était mal vu être d’être géologue et on risquait d’être brûlé vif. Malgré beaucoup de prudence, il nous est arrivé de nous débarrasser des échantillons dans la nature au dernier moment après avoir été prévenu d’un risque.

Quel est ton plus beau souvenir de boulot ?

Il n’y en a pas qu’un. Mes plus beaux souvenirs sont associés aux rencontres sur le terrain, celles de mes collègues et des  habitants. Partager les connaissances, les cultures, les musiques, cela enrichit les missions.

Quels sont tes centres d’intérêt ?

En dehors de la géologie, ils sont classiques ; la randonnée, la nature, la danse, mes enfants…

As-tu une devise ?

Pas vraiment mais en ce moment c’est plutôt Carpe diem.