La pêche : manager pour mieux protéger
79 millions de tonnes, ce chiffre impressionnant correspond à la quantité d’animaux marins pêchés en 2016 (cf. FAO 2018). Si aujourd’hui, les écosystèmes marins sont très fortement menacés par le changement climatique, la pollution ou l’acidification des eaux c’est cependant la surpêche qui reste la principale cause du déclin des communautés marines (crustacés, mollusques, poissons).
On parle de surpêche quand l’augmentation des activités de pêcheries entraine non seulement la diminution de la taille, de l’âge ou de la capacité de reproduction des espèces, pouvant même aboutir à leur disparition complète. Elle est la conséquence d’une consommation de poissons toujours plus importante, multipliée par 2 en 50 ans, elle est passée de 9.9 kg par personne dans les années 60 à 19.2 kg en 2012. Ces pratiques de pêche doivent être contrôlées afin de limiter la pression qu’elles exercent sur les écosystèmes et la biodiversité marine. Ainsi des réglementations ont été mises en œuvre dans différents pays pour mieux gérer et protéger les ressources marines.
L’Union européenne, l’Islande, l’Australie et la Nouvelle-Zélande sont des pays au niveau de développement comparable qui utilisent des techniques de management pour leurs pêcheries. L’Union européenne est l’une des principales puissances de pêche au monde avec une zone économique exclusive de 25 millions de km², ce secteur d’activité a employé 131 525 personnes entre 2009 et 2011. L’Islande, l’Australie et la Nouvelle-Zélande représentent quant à elles l’équivalent de 11% de la flotte de l’Union européenne et 32 % de son territoire de pêche.
Tableau 1 : La pêche en quelques chiffres (Union Européenne, Islande, Nouvelle Zélande et Australie) : taille de la flotte, emplois, valeurs au débarquement, transferts gouvernementaux (différentes périodes envisagées en fonction des données disponibles).
Bien que les techniques de management différent entre ces pays, elles ont été mises en place pour répondre à un objectif commun : le maintien de l’équilibre entre exploitation et préservation des ressources marines. L’exploitation doit pouvoir satisfaire la demande croissante du secteur alimentaire, être viable économiquement et assurer la stabilité de l’emploi. Cependant, pour pouvoir exploiter ces ressources sur le long terme, il est nécessaire de les préserver en assurant le maintien des stocks et la protection de la biodiversité.
Le stock est la partie exploitable d’une population, pour une zone géographique donnée (les œufs, larves et juvéniles trop petits pour être capturés ne sont pas compris dans ce stock).
Les méthodes de gestion des pêches dans l’Union européenne, en Islande, Nouvelle Zélande ou Australie reposent sur des principes équivalents, seule leur mise en place diffère. Deux types d’acteurs principaux interviennent : d’une part les politiques/décideurs et d’autre part les scientifiques qui émettent des observations et propositions pour une gestion cohérente des stocks et la préservation de la biodiversité.
L’Union européenne applique une politique de gestion unique au monde car elle est la seule à devoir concilier, via la Politique Commune des Pêches (PCP), les préoccupations et intérêts des différents pays qui la composent ; ses décisions impliquent la Commission, le Conseil et le Parlement, elles s’appuient en partie sur l’avis scientifique du Conseil International pour l’Exploration de la Mer (CIEM). L’Islande, l’Australie et la Nouvelle Zélande en tant qu’états souverains prennent leurs propres décisions pour leurs eaux territoriales. En Islande, la pêche est gérée par le Ministère de la Pêche, en consultation avec l’Institut de la Recherche Marine (IRM), en Nouvelle Zélande c’est le ministre des Industries Primaires qui prend les décisions en collaboration avec des scientifiques consultés à titre individuel ou rattachés à des instituts de recherche (par ex. l’Institut national des sciences de l’eau et de l’atmosphère). Enfin en Australie c’est le Commonwealth et l’état australien, en concertation avec le Conseil Scientifique National, qui assurent la gestion des ressources.
Afin de pouvoir répondre aux objectifs fixés, différents outils ont été mis en œuvre : le Total Autorisé de Captures (TAC) est appliqué en Australie, Nouvelle Zélande et dans l’Union européenne, il correspond à la quantité d’individus prélevables. Les TAC sont fixés pour une grande partie des stocks commerciaux de poissons, par le pouvoir décisionnel en s’appuyant sur l’avis des scientifiques. Ces pays ont également rendu obligatoire la possession d’une licence ou d’un permis de pêche. Cependant ils ont chacun mis en place, via leur stratégie de management, des mesures de protection qui leurs sont propres.
L’Union Européenne a, jusque récemment, limité la capacité de la flotte et le temps passé en mer. Elle a également mis en place des mesures techniques pouvant, par ex., concerner la taille des mailles des filets de pêche (de 70 à 120 mm en Atlantique et de 20 à 40 mm en Méditerranée). L’Islande et la Nouvelle Zélande appliquent quant à elles, un système de Quotas Individuels Transférables (QIT) qui visent à diviser le TAC et à le répartir entre les entreprises de pêche, ces QIT sont transférables entre les pêcheurs s’ils le souhaitent. En Australie ces QIT sont utilisés uniquement pour certaines pêcheries. De même les attitudes vis-à-vis du rejet des prises lors de la pêche, changent selon les pays : interdiction en Nouvelle Zélande et en Islande mais tolérance en Australie. Un système d’obligation de débarquement des prises se met graduellement en place pour les pêcheries de l’Union européenne depuis 2015 afin de stopper le rejet en mer des captures non désirées.
En parallèle de ces actions de gestion, des efforts et une réelle prise de conscience sont encore nécessaires pour assurer la préservation des Océans. Cela doit notamment passer par l’éducation du public dont les comportements de consommation orientent et encouragent les pratiques de pêches.
Médiation scientifique
Assurée par Marjorie Lortholarie, doctorante de l‘École Doctorale des Sciences de la Mer et du Littoral (EDSML – Université Bretagne – Loire), en 2ème année de thèse dans l’équipe ECEm au sein du laboratoire Mer, Molécules, Santé (MMS) à l’Université de Nantes.
L’article
A comparative review of fisheries management experiences in the European Union and in other countries worldwide: Iceland, Australia, and New Zealand.
https://onlinelibrary.wiley.com/doi/abs/10.1111/faf.12147
Les auteurs
Ce travail résulte d’une collaboration entre 20 chercheurs issus d’universités et instituts européens, australien et néo zélandais. Au niveau français, notons les contributions de Paul Marchal (Unité Halieutique de Manche-Mer du Nord – Ifremer) et de Olivier Guyader, Claire Macher, Pascal Le Floc’h (UMR AMURE – Ifremer, UBO, CNRS).
La revue
« Fish and Fisheries » revue publiée par l’éditeur Wiley, a adopté une approche éditoriale large et interdisciplinaire des domaines de la pêche et de la biologie des poissons. Les articles qui y sont publiés,s’appuient pour un sujet donné sur la littérature existante et ont en général une portée géographique et/ou taxonomique étendue, pouvant ainsi intéresser un large éventail de lecteurs.
Contacts
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La surpêche exerce une pression importante sur la biodiversité des Océans. Afin de préserver ces écosystèmes fragiles, des réglementations sont mises en place qui assurent la gestion et la protection des ressources marines.