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Les vestiges archéologiques côtiers : témoins des changements environnementaux holocènes et indicateurs des activités humaines dans l’ouest de la France ?

Ce projet est fermé et accessible en lecture seule.

Laboratoires/Partenaire

LGO
LETG

Financeur du programme

programme régional
Région Bretagne-Université de Bretagne Occidentale

Résumé

Cette thèse vise à interroger les vestiges archéologiques côtiers de Bretagne, en mobilisant les compétences et connaissances propres à la géologie, la géographie et l’archéologie, afin d’en extraire une série d’informations sur les changements environnementaux holocènes (remontée du niveau de la mer, mise en place et évolution des systèmes côtiers) et les activités humaines qui s’y sont déroulées, en se focalisant principalement sur les activités d’extraction de la roche ayant permis l’édification des monuments les plus remarquables. 


Objectifs

Les populations humaines se concentrent désormais le long du littoral et les écosystèmes côtiers sont parmi les environnements du monde les plus soumis aux pressions d’origine anthropique. Le réchauffement climatique est responsable d’une élévation rapide du niveau de la mer et d’un accroissement de la fréquence et de l’intensité des tempêtes, en cause dans l'érosion des rivages et l’inondation occasionnelle des zones côtières basses. L’un des défis majeurs que doit relever les sociétés contemporaines concerne la mise en œuvre de stratégies durables d’adaptation à ces changements côtiers, permettant de réduire leur vulnérabilité et de renforcer leur résilience. Pour ce faire, une bonne connaissance des socio-écosystèmes et de leur dynamique sur le long terme est indispensable. Or, si de nombreuses recherches sont menées sur les sociétés contemporaines, la profondeur historique en est habituellement absente, alors qu’elle est indispensable pour identifier les grandes étapes de l’évolution du milieu et les réponses des sociétés à ces dernières. Le projet de thèse vise à explorer cette question en interrogeant les données archéologiques et les informations qu’elles délivrent sur les changements de l’environnement côtier de Bretagne durant les derniers milliers d’années. En retour, les conséquences possibles de ces changements en matière d’occupation de l’espace côtier par les hommes seront également interrogées à travers le prisme de l’archéologie. L’approche interdisciplinaire mêlant les sciences de la nature et les SHS trouve un contexte favorable dans le paysage scientifique actuel qui tend à favoriser les synergies entre les disciplines et les spécialités académiques, tant au niveau local (IUEM) qu’aux niveaux national et européen. En effet, la thématique de l’Homme et la Mer et, plus précisément des relations entre les populations littorales et le milieu maritime qui les environnent est une des thématiques fortes de l’IUEM. Pour autant, cette approche, si elle est bien présente au sein de l’institut, se limite essentiellement à la Période Contemporaine en s’autorisant parfois quelques incursions dans le temps long. Depuis peu, sous l’impulsion de quelques chercheurs (archéologue, géomorphologue, géologue, environnementaliste), la question des relations de l’Homme et de son milieu durant l’Holocène est en train d’émerger. A titre d’exemple, un nouveau thème sera représenté au sein de la Zone Atelier Rade de Brest-Mer d’Iroise (ZabrI) pour la période 2016-2020, traitant des interactions Homme-Milieu dans le temps long (Holocène). Ce sujet de thèse s’inscrit donc parfaitement dans cette dynamique.

Méthodologie

A partir d’une démarche rétrospective menée sur le temps long (les derniers milliers d’années), ce projet de thèse se propose donc de répondre à d’importantes questions sociétales et économiques, telles que l’adaptabilité des communautés littorales aux changements climatiques. En ce sens, ce projet relève du défi 1 défini en 2016 par l’ANR. Il s’inscrit dans l'axe 5 "Les sociétés face aux changements environnementaux" et répond également à l’axe de recherche prioritaire n°5, intitulé le « laboratoire » littoral, identifié par les travaux de la Stratégie Nationale de Recherche. Ce projet s’avère aussi complémentaire de nombreuses recherches menées en Bretagne sur les risques côtiers sur les périodes récentes (projet ANR COCORISCO). Le travail sera donc complémentaire des séries de données temporelles sur l’évolution du trait de côte acquises dans le cadre du Système National d'Observation côtière (SNO DYNALIT, http://www.dynalit.fr/fr), et dans le cadre de l’Observatoire du Domaine Côtier porté par l’OSU-IUEM. Ce projet se veut comme une contribution aux politiques publiques de Gestion du trait de côte, notamment par sa dimension patrimoniale qui répond à la réflexion engagée conjointement par le Ministère de la Culture et de la Communication (MCC) et le Ministère de l’Ecologie, du Développement Durable et de l’Energie (MEDDE) sur la nécessité d’inventorier et étudier le patrimoine culturel littoral afin de mieux le protéger de l’érosion marine.

Durant le réchauffement climatique Holocène, les côtes du NO de l’Europe ont enregistré des changements paléogéographiques considérables : inondation graduelle d’une partie de la plateforme continentale consécutive à la remontée du niveau de la mer ; détachement progressif des îles le long des côtes atlantiques et réduction de leur superficie du fait d’un recul du trait de côte par érosion marine ; formation des estuaires, dès lors dominés par des processus fluvio-marins et des transferts sédimentaires complexes entre le fleuve et l’océan ; apparition, par endroits,  de grands complexes dunaires isolant de la mer de vastes zones marécageuses. En dépit des efforts importants entrepris ces dernières décennies par les géologues et géomorphologues, la chronologie de ces grands changements morphologiques reste encore assez mal connue. Pourtant, la recherche archéologique menée ces 50 dernières années met à notre disposition une masse d’information considérable susceptible d’apporter localement des éléments de réponse concernant la dynamique des rivages sur le temps long. Sur les côtes de Bretagne, les données archéologiques existantes sont nombreuses, en particulier celles concernant la longue période allant du Néolithique à l’âge du Fer. A l’occasion des tempêtes hivernales, les vagues dégagent naturellement des coupes et exercent un travail de décapage des affleurements livrant l’essentiel des découvertes archéologiques. L’objectif de ce projet de thèse est donc d’interroger cette masse d’informations afin d’en dégager des données pertinentes sur l’évolution physique du littoral. La question centrale sera donc de savoir en quoi les vestiges archéologiques sont en mesure de nous renseigner sur les modifications de l’environnement côtier. Deux principaux phénomènes seront étudiés : (i) la remontée du niveau de la mer depuis le début du Néolithique qui a entrainé l’ennoiement de nombreux vestiges et (ii) la formation des massifs dunaires qui s’est traduit par l’ensevelissement de structures archéologiques.

Ce type d’approche n’a encore jamais été tenté à l’échelle de la Bretagne. Le caractère minutieux et exhaustif du travail d’archéologue explique probablement pourquoi les informations relevant des paléoenvironnements ont le plus souvent été utilisées uniquement dans la compréhension d’un site en particulier, pour une période bien définie dans le temps. A l’exception des approches palynologiques, les données ont rarement été rassemblées, comparées et synthétisées. Une autre explication réside dans le cloisonnement des disciplines académiques. Le croisement des informations récoltées sur un grand nombre de site d’étude nécessite un important travail d’inventaire, de constitution de base de données, d’harmonisation de l’information, de vérification de terrain et d’acquisition de mesures complémentaires qui nécessite que des compétences scientifiques et techniques très diverses soient réunies. Cet aspect représente un point de blocage que le travail de thèse se proposera de lever.  

Parallèlement, de nombreuses compétences et connaissances acquises par le laboratoire Domaines Océaniques dans le domaine de la géologie et de la connaissance du socle rocheux armoricain ont été insuffisamment mises à profit à ce jour pour répondre à des problématiques archéologiques. L’origine des roches utilisées dans la construction de monuments (sépultures, menhirs, habitations, pêcheries, etc.) a rarement été déterminée. La reconnaissance des lieux d’extraction (carrières) et la provenance des éléments lithiques qui composent ces monuments peuvent désormais être obtenues par la pétrographie et l’analyse des formes de météorisation. L’approche technologique des blocs (traces d’outils en pierre ou en métal) permet également d’affiner la période d’exploitation des carrières ou de mise en forme des éléments lithiques.

Ces informations sont à a même d’apporter une lecture inédite et renouvelée de certains sites archéologiques, de leur fonctionnement, et de leur insertion dans le paysage littoral de l’époque considérée.

Plusieurs questions d’ordre anthropologique sous-tendent également ce travail de thèse. Est-on à même de mettre en évidence au Néolithique et à l’âge du Bronze des phases de pression démographique et des phases de déprise sur le littoral ? Peut-on apporter des éléments de réponse à partir des données climatiques ou géomorphologiques ? La proximité de la mer a-t-elle toujours été un atout pour les sociétés humaines ? Les sociétés côtières étaient-elles tournées vers la mer et l’exploitation de ces ressources ou au contraire tournaient-elles le dos à l’océan ? Les sites insulaires comme certains sites côtiers jouent-ils un rôle particulier (escale technique sur des routes maritimes, production spécifique, centre de redistribution de biens) ? Ce projet de thèse a donc également pour objectif d’apporter des éléments de réponses à ces questions.

L’approche méthodologique s’appuie sur trois grands champs disciplinaires étroitement liés :

1-La géographie, à travers l’analyse spatiale des monuments : leur distribution dans l’espace, leur étagement sur l’estran, leur relevé topographique, leur positionnement stratigraphique, la définition du contexte géomorphologique dans lequel ils s’inscrivent.

2-La géologie, à travers la pétroarchéologie : le prélèvement d’échantillons lithiques sur les monuments et les affleurements alentours, leur examen pétrostructural par l’analyse des lames mince en laboratoire, la reconnaissance des lieux d’extraction respectifs.

3-L’archéologie, à travers l’inventaire exhaustif des vestiges archéologiques côtiers, la mise en place d’une base de données ciblées sur les vestiges côtiers, la lecture technologique des blocs, la typologie des monuments, le questionnement anthropologique sur le fonctionnement des sites et l’intégration de l’Homme dans son Milieu à l’époque.

Ce travail sera mené à l’échelle de différentes fenêtres géographiques réparties sur les différentes façades de la péninsule bretonne.

Participants

Coordinateurs: Pierre Stéphan, Pierre Stéphan
Contributeurs: Pierre Stéphan, Pierre Stéphan