Gestion de projet
- Table-ronde 3 février 2023 - Quelles embarcations sur le littoral atlantique français au début de l’Holocène ? Définir le champ des possiblesSi la question de l’usage de moyens de transport nautiques sur le littoral atlantique français au début de l’Holocène ne se pose pas, celle de leur caractérisation ne se laisse pas aisément approcher, vu la rareté des vestiges : en Europe occidentale, les seuls témoins navals mésolithiques sont constitués par une trentaine de pirogues monoxyles, et aucune ne provient du littoral atlantique. Or, on peut postuler l’existence d’une diversité navale intégrant plusieurs principes de construction aux côtés, voire avant même ces monoxyles. Différentes embarcations à l’architecture fondée sur l’exploitation des ressources végétales et animales offertes localement ont probablement coexisté dès l’origine. On peut supposer des bateaux composites constitués d’une armature légère, végétale voire animale, à la coque revêtue de peaux du type coracle, currach, umiak ou canoë. S’y ajoutent des bateaux à la coque constituée d’écorce, cette dernière tradition n’ayant toutefois pu se maintenir en Europe tempérée après le réchauffement holocène, faute de matière première (bouleau). Des radeaux de fagots végétaux assemblés, qui peuvent offrir d’excellents qualités nautiques pour des cabotages de courtes distances, ont peut-être aussi existé dans les environnements offrant des tiges creuses abondantes (roselières). Il reste donc probable que des bateaux composites aient constitué la majeure partie des embarcations des groupes paléolithiques. Ces traditions ont pu perdurer à l’Holocène, aux côtés des premières pirogues, et même leur être préférées pour les évolutions en mer. Par la suite, on suit leurs traces ténues à travers l’histoire, jusqu’à nos jours pour certains types. Cependant, toutes ces embarcations ont en commun de résulter d’un assemblage de pièces architecturales très périssables pouvant, de plus, se désolidariser après abandon. D’où la quasi-absence de leurs produits dans l’enregistrement archéologique. Les pirogues monoxyles s’ajoutent sans doute plus tardivement à cet ensemble : dans les forêts boréales, les « arbres à pirogue » - c’est à dire présentant un fût rectiligne de grand diamètre sur une longueur de plusieurs mètres, sans branche maîtresse - sont rares, voire inexistants. C’est vraisemblablement de ce fait que les monoxyles n’apparaissent dans l’enregistrement archéologique qu’au début du VIIIe millénaire, alors que la forêt tempérée a remplacé les boisements du Boréal. Depuis ce moment, ces embarcations bénéficient d’une franche hypervisibilité au sein des vestiges navals, du fait de leur conservation accrue. Elles sont peu adaptées aux conditions particulières des navigations en mer, du fait de la faible largeur induite par leur matière première. Pourtant, aucun dispositif complémentaire visant à compenser ce handicap, comme l’adjonction d’un balancier, n’est pour l’heure attesté sur les quelques exemplaires qui nous sont parvenus en Europe. Elles auraient toutefois pu être utilisées pour des petits cabotages côtiers ou de courtes liaisons insulaires. Faute de données issues des épaves, c’est donc une démarche prospective consistant à ouvrir et à délimiter le champ des possibles à partir des référentiels ethnologiques, techniques et environnementaux qui nous permettra de cerner quels types d’embarcations ont pu alors coexister. En se basant sur le référentiel établi par cette démarche, nous pourrons ouvrir une phase expérimentale sur les modèles retenus, dont nous attendons un renouvellement des données. De nombreuses questions restent en effet posées sur les protocoles de construction et sur ceux d’entretien de ces esquifs utilisés dans un milieu dynamique très agressif pour les assemblages, ainsi que sur les capacités de manœuvre propres à chaque type d’embarcation. Le but de cette table-ronde est de confronter les données et propositions de chacun afin d’établir ce référentiel.27.01.2023