Animation "Des espèces venues d'ailleurs"
Animation conçue pour la Fête de la science 2010 (Année internationale de la biodiversité) en complément de l'exposition "D'une mer à l'autre", et adaptée à diverses reprises : Journées Sciences-citoyens 2011 du CNRS à Plozévet (scolaires du CM1 à la Terminale S), Tonnerres de Brest 2012 (grand public)
Thème
Espèces marine et littorales introduites et/ou invasives
Objectifs
- faire connaître le problème général des espèces introduites et invasives en milieu marin
- expliquer la situation et les enjeux de quelques espèces invasives dans le contexte local
- faire connaître les recherches en cours à l'IUEM et ailleurs
Description
L'animation se compose d'un poste consacré aux vecteurs d'introduction et de plusieurs "postes" consacrés à des espèces introduites (en France ou ailleurs), invasives ou non. Chaque espèce est présentée vivante, autant que possible dans son milieu, et accompagnée d'une "fiche d'identité". Ces espèces sont choisies pour leur importance écologique et économique mais aussi visuelle et médiatique, mais ne pas oublier de mentionner que les espèces introduites peuvent être microscopiques, avec des conséquences parfois considérables (exemple le dinoflagellé Alexandrium et ses toxines paralytiques).
Déroulement
Le déroulement de l'animation est à adapter au contexte. Dans un cadre structuré, commencer par la présentation des vecteurs d'introductions avant de parler des cas particuliers.
Pour des enfants (et même pour les autres), on peut commencer par la biodiversité : Qu'est-ce ? Pourquoi est-elle importante ? Quelles sont les principales menaces ? (destruction des habitats et introductions d'espèces)
Puis interroger sur les espèces introduites : Connaissez-vous des espèces introduites en France ? (la plupart des espèces de plantes cultivées, mais aussi l'herbe de la pampa, etc.). En connaissez-vous parmi les espèces marines ? (parmi les plus connues : la caulerpe)
Pour chaque espèce présentée, on peut décliner le discours de la façon suivante (cf. annexe) :
- comment elle a été introduite
- pourquoi elle a survécu et a proliféré
- quel est l'état de ses populations actuellement
- quel est son impact écologique et économique
- que faire pour limiter les dégâts
Postes d'animation
Vecteurs d'introduction
- flotteur ou objets flottants couvert de fouling (maintenu dans l'eau si possible)
- huîtres commerciales
- maquette de cargo, plans de ballasts,… si disponibles
Crepidula fornicata
- thèmes associés : introductions accidentelles, impact économique (coquille St Jacques), rôle écologique et interactions avec autres espèces (rôle dans le cycle du silicium), enjeu de l'élimination (eutrophisation, dinoflagellés)
- aquarium avec crépidules en densité moyenne en rade de Brest
- coquilles de crépidules vides
- possibilité de toucher et de prendre
- si possible, préparations alimentaires ou emballages, publicité,… pour le "berlingot de mer"
Crassostrea gigas
- thèmes associés : introductions volontaires, impact du changement climatique, impact sur la biodiversité
- aquarium moyennement profond (30-40 cm ?) avec différents supports (immergés ou émergés) colonisés par des huîtres de différentes tailles : cailloux, blocs, etc.
Spartina alterniflora
- thèmes associés : adaptation physiologique, spéciation, évolution génétique, polyploïdie
- bac profond (>40 cm) avec couche de vase et pieds de spartine extraits d'un peuplement naturel
- si possible petits bacs avec d'autres halophiles locaux : obione, salicorne,…
- pieds de spartine montrant les rhizomes
Sargassum muticum
- thèmes associés : introduction par les huîtres, impact économique, régression après pic de prolifération, adaptation des prédateurs
- aquarium
Espèces locales en Betagne mais invasives ailleurs
Bigorneau (Littorina littorea), crabe vert (Carcinus maenas, attention à la cohabitation !), Ascophyllum nodosum
Documents complémentaires
- Vecteurs d'introduction d'espèces marines : huître creuse, coques de navires, ballasts
- Fiches descriptives des espèces
Récolte des espèces et maintenance des aquariums
- crépidules : nécessite un trait de drague en rade de Brest (Albert Lucas)
- huîtres : difficile de détacher les huîtres sauvages des rochers sans les endommager. Prélever des huîtres fixées sur des galets dans le fond de la rade de Brest, par exemple à gauche du cordon dans l'anse de la pointe du Château (Logonna Daoulas)
- sargasse : dans la plupart des flaques de l'estran (notamment côté est de la Pointe du Diable), mais seulement au printemps et surtout en été
- spartine : dans les vasières des estuaires de la rade ; un point facilement accessible en voiture (la vase est très lourde…) est sur la rive gauche de l'anse de Penfoul (sud de Loperhet), en face du hameau de Pedel (cf. carte). Prélever des mottes de vase d'une vingtaine de centimètres d'épaisseur, avec des pieds de spartine et les mettre dans le bac
- autres espèces mentionnées (bigorneau, crabe vert, Ascophyllum) : un peu partout
Toutes les espèces présentées sont robustes et leur maintien pendant quelques jours ne nécessite pas de précautions particulières si les aquariums sont protégés de la chaleur (lumière, réfrigérant si nécessaire) et oxygénés par des bulleurs (pour les animaux). La seule opération à faire impérativement est de changer l'eau des crépidules tous les jours à cause de l'apparence et surtout de l'odeur du mucus qu'elles sécrètent en abondance.
Annexe
Crépidule
- comment elle a été introduite
Introduction accidentelle
Arrivée en Angleterre avec des huîtres en provenance des USA (Virginie) dans les années 1870, puis Belgique, Pays-Bas, etc.
Apparition en France dans les années 1930 avec des huîtres importées des Pays-Bas
Arrivée massive en France dans les années 1940 à partir d'Angleterre (débarquement, liberty-ships)
Troisième vague dans les années 1970 avec du naissain d'huîtres japonaises importé du Japon et du Canada (où elle avait aussi été introduite)
=> importance des introductions multiples : Pourquoi est-ce important ?
- pourquoi elle a survécu et a proliféré
Facteurs propres à l'espèce :
Mode de reproduction très efficace : hermaphrodite protandre, chaînes d'individus favorisant la fécondation, phase de dispersion larvaire
Faibles exigences écologiques
Facteurs propres à l'écosystème :
Prédateurs naturels absents en Europe (bernard l'hermites, crabes, bigorneaux perceurs, étoiles de mer, etc.) ; les espèces locales de ces groupes ne la reconnaissent pas comme une proie potentielle
Facteurs propres à l'homme
Introductions multiples
Echanges entre bassins ostréicoles
Dispersion par rejet en mer
- quel est l'état de ses populations actuellement
Présente sur toute les côtes françaises, mais surtout en 3 sites : Baie de St Brieuc, Baie du Mont St Michel, rade de Brest : près de 500.000 tonnes
Taux de couverture sur le fond parfois proches de 100%
Evolution récente : difficile à suivre faute de données… Déclin ?
- quel est son impact écologique et économique
Ecologique : occupation du fond ; production importante d'excréments et de mucus (favorise un développement bactérien, appauvrit le sédiment en oxygène, uniformise le fond ; sédimentation et hydrodynamisme ; modification des cycles biogéochimiques (Si)
Economique : ostréiculture (entretien des concessions, nettoyage des huîtres) ; pêche de la coquille : fonds moins productifs (densité moindre de coquilles, diminution du recrutement), colmatage des dragues, tri et nettoyage des coquilles
- que faire pour limiter les dégâts
Elimination : impossible !
Exploitation : chair + coquille ; séparation des deux ; valorisation de la chair (berlingot de mer) ; quelle limites à la faisabilité économique ?
Sargasse japonaise
- comment elle a été introduite
Introduction accidentelle
Avec du naissain d'huître importés du Japon au début des années 1970
- pourquoi elle a survécu et a proliféré
Facteurs liés à l'espèce :
croissance très rapide (au printemps elle peut atteindre 10 cm par jour),
pouvoir reproducteur élevé durant la période estivale,
dispersion efficace des rameaux grâce aux flotteurs,
grande aptitude à la fixation sur n'importe quel support solide et mobile,
faculté d'adaptation importante
grande tolérance vis-à-vis du milieu qu'elle colonise
Facteurs liés à l'écosystème :
peu de prédateurs naturels sur nos côtes
Facteurs liés à l'homme
transfert entre bassins conchylicoles pour les activités aquacoles,
- quel est l'état de ses populations actuellement
Apogée de la prolifération dans les années 1980 : chenaux bouchés, etc.
Diminution puis stabilisation depuis ; adaptation d'organismes autochtones comme des épiphytes, ou des brouteurs comme l'oursin
- quel est son impact écologique et économique
Ecologique :
compétition pour l'espace, la lumière ou les sels nutritifs, pouvant aller jusqu'à l'élimination des espèces concurrentes (macroalgues, phytoplancton)
création d'un habitat là où les laminaires ne poussent pas (espèce structurante)
Economique :
Beaucoup moins important que dans les années 1980
aquaculture et pêche (fixation), entrave à la navigation,
- que faire pour limiter les dégâts
Arrachage : limité, coûteux et dangereux (risque de dissémination)
Lutte chimique : peu efficace, toxicité des produits
Lutte biologique : à trouver…
Aucun moyen efficace, mais lutte de moins en moins justifiée, sauf très localement
Huître creuse du Pacifique
- comment elle a été introduite
Introduction volontaire
Fin des années 1960, début des années 1970, en réaction à la disparition de l'huître portugaise décimée par une maladie ; importée de la côte ouest du Canada
- pourquoi elle a survécu et a proliféré
Facteurs liés à l'espèce :
Seuil thermique de température initialement incompatible avec le milieu en France, puis devenu compatible (premières reproductions spontanées en 1975 et 96)
Pas spécialement de facteurs liés à l'écosystème
Facteurs liés à l'homme :
l'accélération de son extension vers le nord est lié au réchauffement des eaux côtières depuis une trentaine d'années
- quel est l'état de ses populations actuellement
Envahissement dans toute l'Europe ; densités très fortes dans certains endroits (plusieurs centaines par m²)
- quel est son impact écologique et économique
Impacts contrastés sous les eux aspects :
Ecologique :
Pas de compétition avec autres espèces ; création de reliefs (bancs), abri de biodiversité ; envasement autour des récifs ; effet de seuil pour une modification profonde du milieu ?
Economique :
Gêne pour les activités de loisir (pêche à pied, kayak,…) ; fixation sur les structures conchylicoles (poches) et aquacoles (cages), portuaires (quais, pontons,…) ; nuisance paysagère ; ressource pour la pêche à pied ; source de naissain pour l'ostréiculture (mortalités des juvéniles) ?
- que faire pour limiter les dégâts
Elimination : impossible et pas souhaitable
Seule piste actuellement : nettoyage mécanique de certaines surfaces
Spartines alterniflore et anglaise
- comment elle a été introduite
Introduction accidentelle (?) de S. alterniflora (espèce américaine) en Angleterre au début du 19ème siècle ; passage en France
Hybridation avec l'espèce locale anglaise (S. maritima) : naissance de S. townsendii, hybride stérile puis à un polyploïde fertile et invasif, S. anglica
- pourquoi elle a survécu et a proliféré
Facteurs liés à l'espèce :
Capacité d'hybridation et de polyploïdie (S. anglica)
Grande tolérance écologique due à la polyploïdie (gammes de salinité, de température, de sols, d'émersion/immersion)
Facteurs liés à l'écosystème :
Pas spécialement de facteurs liés à l'écosystème
Facteurs liés à l'homme :
Pas spécialement de facteurs liés à l'homme outre l'introduction volontaire
- quel est l'état de ses populations actuellement
S. alterniflora : France : rade de Brest uniquement ; suivi en cours
S. anglica : partout ailleurs en France
- quel est son impact écologique et économique
Ecologique :
Elimination des autres espèces halophiles des vasières
Menace sur une espèce endémique (petit statice)
Modification de l'hydrodynamisme et de la sédimentation
Economique :
Pas d'impact économique
- que faire pour limiter les dégâts
Arrachage : difficile avec risques de dissémination par les fragments de rhizomes
Barrières PVC dans le sol : localement pour protéger le petit statice
Tonte ?
Lutte biologique ?
Valorisation : molécules actives ?